Comment fluidifier la charge mentale ?
Peu importe le niveau d’étude, le travail, la position, la charge mentale est présente.
Toujours recluse dans un coin de votre tête, c’est une camarade dont on se passerait bien. Elle s’éveille en même temps que vous, vous accompagne dans le métro, vous suit jusqu’à la porte du bureau. Sans relâche elle exerce une pression trop souvent sous-estimée, mais qui a pourtant un réel impact sur la productivité et le bien-être.
La charge mentale a été définie pour la première fois par la sociologue française Monique Haicault en 1984. Elle la qualifie comme le fait de devoir penser simultanément à des choses appartenant à deux mondes séparés physiquement. La charge mentale est présente dans la sphère intime comme professionnelle. D’ailleurs selon l’institut national de recherche sur la santé, la charge émotionnelle est le fruit de la relation entre des rapports interpersonnels et des conditions de travail vécues comme défavorables.
Dans le cadre du travail, être capable de mesurer la charge mentale permettrait d’identifier en substance les potentiels conflits freinant la productivité et le développement des entreprises. En interrogeant la relation entre mental et monde du travail on peut réfléchir à une meilleure coordination entre ces deux univers afin d’établir un dialogue construit qui soit bénéfique aux deux parties.
Pour créer ce dialogue Corine Robert-Van De Weerdt nous explique qu’il faut faire appel à l’ergonomie cognitive. L’ergonomie touchant à la connaissance et l’optimisation du travail, le terme cognitif désigne la cognition (le processus d’acquisition de la connaissance). D’après son article Analyse des émotions en situation de travail, une approche psycho-ergonomique les recherches sur l’ergonomie cognitive permettraient d’avoir une mesure de la charge mentale « pour pouvoir fournir des pistes de recommandations et d’actions, en vue de la transformation et la prévention de situations à risque ». Pour simplifier l’ergonomie cognitive est un outil qui nous permettrait d’identifier la charge mentale pour ensuite mieux la traiter.
Il se trouve que le design Thinking a fait ses preuves concernant l’ergonomie cognitive. À mon sens le design peut se présenter comme une réponse efficiente aux problématiques associées à la charge mentale. Si la démarche commune à tous les domaines du design est d’établir une passerelle entre le concept et le tangible, le design thinking aime quant à lui envisager des réponses à des problématiques associées à l’organisation et à la structuration d’un service. Il crée des liens tangibles et abstraits entre différents acteurs, qui participent à leurs cognitions en interrogeant ou recréant les statuts, fonctions ou tâches de chacun. Le design thinking propose une analyse du vécu qui est théorisée puis soumise à des tests afin de proposer une réponse efficiente.
Cette démarche que l’on pourrait qualifier de scientifique est menée par des agences de design comme les Sismo ou encore celle de Matali Crasset. Elles sont en capacité d’établir une démarche sensée mais qui manque parfois de structure et se montre trop instable, ce qui a pour effet d’engager des processus très longs. Dans le domaine du conseil, il est courant de proposer une structure solide, mais qui malheureusement ne considère pas, ou trop peu les charges mentales et les problématiques sociales qui y sont associées. La solution se cacherait-elle dans la réunion des domaines du conseil et du design ? Ce qui est sûr c’est que selon les dires de Corine Robert-Van De Weerdt, d’après l’engouement naissant pour le design thinking, et l’ouverture dont font preuves certaines agences comme YouMeO (qui travaille conjointement avec des designers et des sociologues) ou encore Idean, la considération de la charge émotionnelle/mentale aux regards de l’évaluation cognitive s’inscrit comme un positionnement à l’avenir prometteur.
Bryan Silmar
Designer d'expérience et Consultant en Innovation chez YouMeO